J’ai vu il y a quelques jours Personal Shopper. Malgré à mes yeux des invraisemblances et un Benjamin Biolay toujours aussi insupportable, j’ai adoré le film. Je ne m’attendais pas à un tel mélange de fantastique et d’horreur couplé à la poésie et à la délicatesse du deuil. Mais c’est surtout Kristen Stewart qui y était impressionnante. J’ai alors repensé au parcours qui était le sien depuis Twilight et au combien elle a su profiter de cette mise en avant pour ensuite pouvoir choisir des projets plus intéressants et audacieux. Et si ce genre de blockbuster est un merveilleux tremplin il n’est pas utilisé à bon escient par tous. Pour les plus talentueux et futés on remarque en tout cas des virages à 180 degrés pour casser une image qui pourrait que trop coller à la peau. Je ne vais revenir que sur quelques acteurs, d’abord car je les apprécie, ensuite parce que je trouve leur parcours passionnant. Si vous souhaitez que nous discutions d’autres acteurs qui vous semblent être dans le même cas je serai heureuse d’en parler avec vous dans les commentaires.

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Kristen Stewart dans Personal Shopper, Olivier Assayas, 2016

Ryan Gosling, Britney Spears, Christina Aguilera, Justin Timberlake, … Ces acteurs étaient présentateurs dans le Mickey Mouse Club. Ils appartenaient à Disney. Ils ne pouvaient jusqu’à leur majorité participer à un projet artistique sans l’aval du studio aux grandes oreilles. Leurs habits, leur présence sur les tapis rouges, tout appartenait à Disney. Ils étaient dépossédés de leur corps en attendant patiemment la majorité. Tout comme Zac Effron avec High School Musical. Se réapproprier son corps c’est parfois montrer que cet outil n’a plus de limite (on pense alors au changement capillaire de Miley Cirus et Britney Spears). Zac Effron a d’abord voulu se moquer de sa propre image avec son rôle dans Hairspray, mais c’est surtout dans Paperboy que l’acteur brise son passé d’ado star pour s’épanouir en tant qu’acteur. La scène où Nicole Kidman lui urine dessus sur la plage rompt définitivement avec ce statut lisse qu’il avait acquis durant son adolescence.

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Zac Effron et Nicole Kidman dans Paperboy, Lee Daniels, 2012

Outre casser le fantasme de l’acteur en malmenant son corps, briser une image peut passer par une exigence dans ses choix artistiques en s’écartant du carcan blockbuster grâce à des collaborations avec des réalisateurs indépendants, étrangers ou aux budgets modiques. Les stars de Twilight Robert Pattinson et Kristen Stewart ont fait ce choix là en devenant muse d’auteur, le premier avec David Cronenberg, la deuxième avec Olivier Assayas. On sent d’ailleurs chez ces cinéastes une volonté de vitalité nouvelle grâce à la possibilité de façonner un acteur encore brut et de profiter de ce nouveau dynamisme dans l’inspiration. Après une première collaboration dans Sils Maria, Olivier Assayas a d’ailleurs écrit Personnal Shopper pour l’actrice.  Se caractériser en devenant l’acteur fétiche d’un cinéaste à l’univers artistique marqué et sans grand budget, c’est s’affranchir de l’aspect bancable de l’ado star pour s’orienter vers une réelle recherche artistique au travers d’une filmographie devenue sélective. Dans la même veine, on pense évidemment aussi à Jennifer Lawrence, muse de David O Russell avec qui elle a pour l’instant tourné trois long-métrages. On peut parler d’ailleurs aussi de cassure avec ses rôles quand elle interprète une veuve nymphomane dans Hapiness Therapy ou une mère et épouse d’un mari volage dans American Bluff. On est alors bien loin de son personnage de Katniss dans Hunger Games, mais je n’ai pourtant pas l’impression que comme les acteurs cités précédemment qu’elle ait eu réellement besoin de se refaire une image aux yeux du public et de la critique, tout comme une Emma Watson qui malgré une franchise adolescente et des films parfois mauvais n’est jamais dénigrée par les spectateurs et semble presque intouchable. Mais ceci est une autre histoire.

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Jennifer Lawrence dans American Bluff, David O Russell, 2013

Revenons au cas Kristen Stewart. On lui a souvent reproché ses mimiques de jeu de biche effarouchée (battements de cils, moue, …), mais cela donne à mes yeux une délicatesse que l’on retrouve dans tous ses rôles, même les plus singuliers. Elle apporte ainsi cette indépendance douce et sauvage au personnage mythique de Marylou dans Sur la route réalisé par Walter Salles ou dans The Guard où elle joue un soldat. On retrouve d’ailleurs dans sa collaboration avec Walter Salles ou celle de Olivier Assayas une envie de travailler avec des réalisateurs étrangers de tout horizon, comme une recherche artistique loin de ce que le public peut attendre d’elle. Il est vrai que sa filmographie et ses choix de rôles me fascinent. Elle est toujours là où on le l’attend pas, et en cela c’est une actrice passionnante à mes yeux. Il est aussi singulier qu’elle n’utilise pas sa renommée pour mettre en avant ses collaborations artistiques dans par exemple l’envoûtant clip I was Broken du chanteur Marcus Foster. Comme si au delà de sa vie privée, c’est aussi sa carrière qui devait être officieuse.

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Kristen Stewart, Sur la route, Walter Salles, 2012

On reconnait chez certains jeunes acteurs mis en avant trop tôt par le star-system une envie de se réapproprier son corps et s’ouvrir vers un jeu différent pour mieux brouiller une filmographie qui devient alors imprévisible. Tout comme Ryan Gosling qui se s’est affilié à un réalisateur pour mieux se plonger dans cette démarche avec Nicolas Winding Refn et a joué des personnages loin du sex symbol en interprétant un tueur en série ou un prof drogué, on retrouve dans la génération d’acteur suivante une volonté encore plus prononcée allant même dans les extrêmes.