Le premier comics que j’ai lu, c’était Sin City: Des filles et des flingues. Déjà ça se pose là en terme de level. C’est comme si le premier film que vous aviez vu était 2001 l’Odyssée de l’espace, le premier album écouté S&M de Metallica, la première série vu The Wire, au lieu des classiques Le Roi Lion, Club Dorothée et L’âne Trotro. J’ai mis longtemps ensuite à plonger dans l’univers des comics, étant quelque peu rebutée par la profusion marvellienne, qui à mes yeux n’est pas assez sombre et nuancée, mis à part quelques perles rares comme Civil War, qui n’a définitivement rien à voir avec son adaptation ciné. Ma bibliothèque est d’ailleurs témoin de mon gout pour les histoires sombres…

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Pour les yeux les plus affûtés et connaisseurs, vous trouverez une prédominance pour mes dieux de la bulle, à savoir Scott Snyder et Joe Hill (fils de Stephen King), ainsi que des stars comme Gaiman, Moore, Rucka, Miller, Ellis et tant d’autres qui attisent ma flamme. J’ai décidé de laisser de côté mon amour pour des classiques comme Watchmen ou Le Batman de Frank Miller qui ne sont plus à présenter, pour vous en proposer d’autres, certains très connus, quelques-uns beaucoup moins. Voici une petite sélection de comics pour toi cher lecteur, histoire de sortir des sentiers battus de 28 films plus tard …

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The Killing Joke, Alan Moore et Brian Bolland, 1988, one shot

La perfection en 48 pages, tel un uppercut de Ali dans la face de Ramsey Bolton. Sensé être à la base un one-shot, il est désormais un fondement de l’univers de la chauve souris. Violent, choquant, percutant, les qualificatifs sont légions et les lecteurs de comics sont pour une fois unanimes, Killing Joke est un chef d’oeuvre du comics condensé en pourtant un nombre ridicule de pages. L’apogée de cette oeuvre se trouve en cette dernière planche d’une maturité et d’une simplicité singulière et terrible qui a donné lieu à des débats révoltés sur l’analyse de cette fin d’anthologie. Je pense quant à moi qu’il y a autant de lectures qu’il n’y a de lecteurs et que les théories sont toutes vraies si elles sont énoncées avec passion. Après tous ses superlatifs, vous aurez compris que ce comics est à mes yeux un classique intouchable, qu’il est une oeuvre maîtresse de ma geekerie. Tant de bons sentiments pour une oeuvre aussi cruelle…

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The Killing Joke, 1988

Locke and Key, Joe Hill et Gabriel Rodriguez, 2008-2013, 6 tomes

Ma meilleure amie dit que c’était prévisible que je tombe amoureuse de l’homme qui est aujourd’hui mon mari, parce qu’il avait tous les ingrédients qui faisaient que c’était une évidence, aussi bien physiquement que dans son ptit crane. Bon et bah mon mari lui il dit que tous les ingrédients étaient réunis pour que Locke and Key soit mon comics préféré. La ville où se passe l’histoire s’appelle Lovecraft (déjà ça se pose là), on suit une famille dans une maison hantée (ok là je suis déjà accro), il y a des énigmes, des meurtres, des personnages complexes, les dessins sont d’une maîtrise sidérante et tout particulièrement les dessins des cerveaux, une claque visuelle qu’il faut regarder 10 minutes pour en saisir tout le sens. C’est scénarisé par Joe Hill (c’est bon on vous a dit que j’étais conquise, pas la peine d’en rajouter merci), … Bref vous l’avez compris, si vous souhaitez du très bon, Welcome to Lovecraft!

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Locke and Key

American Vampire, Scott Snyder, depuis 2010, en cours 7 tomes

Si comme Scott Snyder, vous rêvez d’enfermer dans un égout les vampires esthètes ou brillants au soleil en compagnie de Ça, cette série de comics est faite pour toi cher lecteur. Ici les vampires peuvent être des européens nababs obèses libidineux aux crocs affûtés ou des cowboys américains gangsters friands de bonbons et de chaires à grailler. Tout est sordide: le dessin, les personnages, l’histoire, … American Vampire retrace l’Histoire avec un grand H de la construction de la l’Amérique à travers les yeux de vampires d’un nouveau genre. Scott Snyder revient aux sources de ce qui fait le vampire; une créature sanguinaire, déchiqueteuse de gorges en série sans état d’âme. La créature la plus douce de la saga est la jeune femme ci-dessous qui sort parfois les crocs pour protéger son mec… C’est dire!

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American Vampire

Jupiter’s Legacy, Mark Millar et Frank Quitely, 2016-2018, 2 tomes

Des gosses de riches qui sniffent de la coke, dorment la journée et passent leur nuit en boite, enchaînent les cocktails, les passages dans les tabloïds et les coups d’un soir… Sauf que leurs parents sont les plus grands supers héros de la planète. Jupiter’s Legacy, c’est une petite bombe que je n’attendais pas mais qui a bouleversé mon appétence pour les comics. En cette époque de standardisation du super, il s’empare des codes pour les recracher en un objet affûté, qui dénonce une société du paraître et une pop culture toute tracée. Édifiant!

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Jupiter’s Legacy

Nailbiter, Joshua Williamson et Mike Henderson, 2014-2017, 6 tomes

Ouais ça s’appelle le croqueur d’ongle. Déjà rien que ça le gars il m’avait séduit, il ne lui restait pas grand chose pour me pécho. L’histoire est bien fichue, on n’en démord pas (oui j’ai osé) avant d’avoir lu la dernière case du dernier tome. En gros pour vous amener le sang à la bouche (Marion faut s’arrêter maintenant), c’est l’histoire d’une petite ville paumée au fin fond du trou du cul de l’Amérique, qui a vu naître pas moins de 16 des pires tueurs en série des USA. Du coup il y a pas mal de gens qui aimeraient comprendre et trouver le mystère de cette ville flippante, où même un chat noir n’oserait pas y foutre une patte. C’est WTF à mort mais qui s’en plaindrait?!

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Nailbiter

La Ligue des Gentleman Extraordinaires, Alan Moore et Kevin O’Neill, depuis 1999

Aucune comparaison possible avec le bousin adapté au cinéma par Stephen Norrington. On ne peut même plus parlé d’adaptation libre tellement les différences sont pléthores. Dans le comics, Quatermain est un drogué qui refuse de se rendre compte qu’il est fou amoureux de Mina, qui n’est absolument pas une vampire d’ailleurs, et l’homme invisible est un violeur en série. Le dessin est visuellement très vivant et coloré, ce qui contraste avec le propos violent et amer. Ici bonjour racisme, sexisme, et autres abominations qui vont bon train dans un décor steampunk surréaliste. Un classique desservi par un film d’une médiocrité abyssale, qui a poussé Alan Moore à se montrer réticent aux adaptations de ses œuvres iconiques au Cinéma.

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La Ligue des Gentleman extraordinaires

The Authority, Warren Ellis et Bryan Hitch, 1999-2010

Rarement un comics récent n’aura eu autant d’impact sur la pop culture. C’est à mes yeux le passage à l’an 2000 du super héro, où la bulle s’interroge et se positionne politiquement. Le comics est alors un objet culturel sociale aiguisé qui vit avec son temps et se veut aussi visionnaire, avec un constat sur l’écologie et la géopolitique. Warren Ellis se veut précurseur et nous offre des personnages ouvertement gay (qui adoptent d’ailleurs un enfant) et des supers héros loin d’être sans failles, qui seront d’ailleurs un exemple scénaristique pour la majorité des adaptations superhéroiques des années 2000-2010, alors même que The Authority ne trouve pas sa place sur grand écran.

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The Authority

The Cape, Joe Hill et Zach Howard, 2010, one shot (préquel: The Cape: 1969)

Un looser se rend compte que la cape fabriquée par sa mère dans son enfance lui apporte de nombreux pouvoirs. Il en profite alors pour faire un tour et reconquérir son ex. Là, j’ai assisté à la case la plus surprenante et impitoyable de ma vie de lectrice de comics, car l’horreur y est injustifiée et sans filtre. Trouve le et lis le cher lecteur, je ne peux/veux rien te dire de plus!

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The Cape