Tous les trois sont français et ont entre 30 et 33 ans. Mince fourchette pour une génération BD de grand talent, chacun avec un univers visuel propre et des thématiques virant à l’obsession. Trois valeurs montantes qui n’ont déjà plus rien à prouver et dont j’attends chaque parution avec ferveur. Parlons aujourd’hui de Jeremy Moreau, Lucas Harari et Timothé Le Boucher.
J’ai commencé la BD vers 8 ou 9 ans avec la bibliothèque de mon grand frère. Je me suis d’abord plongée dans Dragon Ball et La Caste des Méta-Barons (je n’avais rien compris à l’époque à cette fable spatiale politique aux allures de tragédie grecque Œdipienne). J’ai ensuite lu avidement au début de l’adolescence en médiathèque les Sin City et Blacksad, et je suis restée cantonnée pendant assez longtemps au comics avec une préférence pour le gore et l’horreur. Mais depuis environ 2 ans, je me suis ouverte à la bonne vieille Bande dessinée européenne (je pense qu’on ne peut plus parler de BD franco-belge), avec de jolies trouvailles françaises qui sont devenus sans m’en rendre compte mes chouchous (aaah les fourbes). Pleins phares sur deux œuvres de ces minots frenchies déjà (très) grands.
Jeremy Moreau: Penss et les plis du monde, La Saga de Grimr




Odes écologiques, La Saga de Grimr et Penss et les Plis du Monde de Jeremy Moreau sont des bijoux visuels particuliers. La nature est organique, les racines et la lave ont une pensée propre, une volonté destructrice et créatrice que subissent les personnages mais les rendent aussi héroïques. Ces héros sont hors de leur époque, visionnaires, marginaux, incompris, pour mieux devenir les légendes de leur temps et changer le cours de l’Histoire. Mes coups de cœur incontestés.
Lucas Harari: L’aimant, La dernière Rose de l’Été




Lucas Harari a fait les Arts Déco et ça se voit. La composition des cases est géométrique, ce qui est encore plus frappant d’ailleurs dans mon chouchou L’Aimant, dont le personnage principal est passionné d’architecture. Ces lignes épurées permettent aux angles morts de devenir des couloirs sombres pour mieux effrayer, pour mieux tuer. Car le crime et la mort rôdent chez Harari, au creux d’une montagne Suisse comme sur une plage brûlante dans La Dernière Rose de l’Eté.
Timothé Le Boucher : Le Patient, Ces jours qui disparaissent




Faux semblants, illusions, monstruosités infantiles, les récits de Timothé Le Boucher sont percutants, choquants aussi. Sous ces gueules d’anges, les adolescents sont des enfants immoraux se rêvant adultes. Servis par des dessins plus classiques que Harari et Moreaux, Timothé Le Boucher offre des récits sur un long fil temporel pour mieux nous brouiller, pour mieux nous plonger dans l’étrange vie de ces anti héros, flirtant avec le fantastique sans jamais y céder et ainsi mettre en avant l’affreuse vérité du réel. Plus accessible visuellement que ses collègues mais aux scénarios terriblement plus complexes, laissant libre court à autant d’interprétations qu’il y a de lecteurs.
J’ai eu un vrai coup de coeur pour Les jours qui disparaissent à sa sortie. La complexité du scénario, la thématique du double, du temps qui passe (un des rares héros qu’on voit entièrement vieillir), d’hésiter entre deux vies, les noeuds au cerveau que donne le scénario quand même, la multiplicité des thèmes évoqués… J’avais adoré. Le Patient, beaucoup moins, qui m’a emmené bien moins loin, et qui m’a paru bien moins complexe, moins à double lecture.
Lucas Harari, je ne connais pas, mais il a effectivement une patte graphique à part. J’ai aussi lu Penss et les plis du monde, très atypique et qui change beaucoup, mais sans véritablement accrocher. Mais je comprends qu’il ait été dans tes coups de coeur !
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Je suis tout à fait d’accord pour Ces jours qui disparaissent. Scénario extrêmement complexe, plusieurs lectures possibles, et le vrai sentiment de vivre toute une vie avec un personnage…
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Quelle bonne idée de parler BD ! Je ne connais que Ces jours qui disparaissent, mais sa lecture m’a beaucoup marqué. Merci pour les conseils !
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