Ce texte est très intime, vous êtes prévenus.
J’ai l’impression d’écrire depuis toujours. Chez ma grand-mère il y a un poème sur la Lune que j’ai écrit à 8 ans qui est encadré dans le salon. Primaire et collège je suis restée cantonnée à la poésie et au lycée, j’ai commencé les nouvelles et les textes plus intimes, la rage que je griffonne sur du papier qui sert de catalyseur. Le papier est mon meilleur psy. Les mots y sont toujours dures et les poser sur une feuille c’est me sentir un peu plus légère, mais ce n’est pas sans douleur. Car déposer une pierre c’est se rappeler qu’elle existe. J’ai 28 ans et je crois que ça fait 10 ans que j’essaie d’écrire un roman. Je n’avais jamais réussi à dépasser les dix pages et à chaque fois, mon mari me ramassais à la petite cuillère. J’étais irritable, démesurément triste, plombée par quelque chose qui était trop dur à sortir sur autant de pages. Et un jour, dans une nouvelle, j’ai tué ma mère. Jamais je ne me suis sentie aussi bien après avoir écrit. L’écriture avait toujours été une thérapie douloureuse, là elle était salvatrice. J’en ai parlé à ma meilleure amie, qui a trouvé extrême le meurtre de ma mère. Elle avait raison, mais je crois que ce qui m’a permis de pouvoir enfin écrire un véritable roman, c’est l’auto-autorisation d’exprimer une vengeance crasse mais sans danger car fictive. Et après avoir presque écrit mon roman en entier, je suis persuadée d’une chose: chacun de mes romans la tuera. Mon obsession à moi, qui délivrera de tout, supprimer mon plus grand démon.
On parle de sauter le pas, franchir la ligne. Ecrire un roman, une oeuvre de plusieurs milliers de mots et de centaines de pages, ce n’est pas anodin. Personnellement, je ne me suis pas mise à écrire pendant des heures et paf, l’esquisse d’un roman était né. Peut-être que certains ont la chance d’accoucher d’un bébé roman qui s’est construit d’une manière linéaire. Moi pas, je ne voulais pas me vautrer, créer pour ensuite tout avoir à détruire. Je suis de formation littéraire avant d’être métallurgiste en aéro, alors j’ai cherché, et j’ai fait des plans. J’ai cherché des conseils d’abord, de bien meilleurs que moi qui en vivaient, de leur plume. J’ai lu les recommandations de Bernard Weber et de Stephen King, j’ai écouté le formidable podcast d’Arte, Bookmakers (Arte, mon amour pour toi dur depuis le lycée, il était temps que ça sorte). J’ai pris beaucoup de notes, qui étaient faites de choses dans lesquels je me retrouvais ou dans lesquels j’avais envie de me retrouver. Et une fois tous ses conseils ingurgités et recrachés sur mon calepin, j’ai fait des plans et des listes. Il n’y a rien de sexy ni de romanesque dans une liste, même la liste de course de Boris Vian ne devait pas être passionnante. Je me suis d’abord demandée ce à quoi j’aspirais: ce roman, je voulais qu’il ressemble à quoi? Rapidement, je me suis réclamée de My absolute Darling (Gabriel Talent) et de Cadavre Exquis (Agustina Bazterrica). Je trouvais ça un peu pompeux de viser aussi haut mais dans les thématiques qui mûrissaient dans mon esprit, je me retrouvais dans ces deux romans. J’ai alors fait la liste de ce qui faisait que je les aimais, ce qui m’avait marqué, … En gros ce qui faisait que la narration fonctionnait. Et je m’en suis inspirée pour mon plan. Au final, mon roman ne ressemble pas du tout aux deux cités précédemment, mais en décryptant la narration, ça m’a permis de faire ressortir mes propres désirs narratifs. Le plan après ça est venu très facilement, fait de mots entourés et de flèches partout. Ce n’était pas figé et pourtant, en le regardant aujourd’hui, je me rends compte que rien ou presque n’a changé.
Ecrire cet article, c’est faire une sorte de bilan pour moi-même, en cette fin d’écriture. Ce n’est pas un tuto sur l’écriture d’un premier roman, c’est surtout mon parcours et mon point de vu de meuf qui se rêve écrivain. Ecrire un roman c’est pleins d’emmerdes, parce qu’il y a des moments où tu n’es pas inspiré, d’autres ou tu aimerais que les journées durent 40h parce que tu as trop d’idées. J’ai eu une pause de plusieurs mois dans l’écriture, parce qu’il y a le taff, la famille, et tout le reste. Je rêve de n’avoir qu’à envisager d’écrire, que ça soit mon travail. Et d’ailleurs, je le vis vraiment comme ça. Quand la porte est fermée, mon mari et ptit loup n’ont pas le droit d’entrer, ce qui a été très mal compris et perçu au début. Je me fixe aussi des horaires, qui ne sont pas toujours respectés par moi-même, mais qui me mettent un cadre de travail. Je ne le vois pas comme un loisir même si c’est une passion, vous me suivez? Il faut de la rigueur et si on veut parvenir à quelque chose de potable, il faut se relire tout le temps, rayer, modifier, … Les deux meilleurs conseils que j’ai lu/entendu, ce sont de Bernard Weber et d’Alice Zeniter (ou Philippe Jaenada?). Le premier disait que l’écriture est un artisanat et qu’il faut au moins deux de ces trois choses pour réussir: Talent, Chance, Travail. Le deuxième disait qu’un roman était achevé quand on ne pouvait plus voir en peinture son roman. Parce qu’un roman est un objet qu’on peut améliorer perpétuellement mais qu’il faut à un moment s’arrêter, quand on a juste envie de le mettre au bûcher…
Personnellement je n’en suis pas du tout là, mais j’ai hâte d’avoir cet objet entier dans les mains. Terminer un roman, c’est la première étape d’un accomplissement. Il y a des personnes formidables qui me relisent, et c’est génial d’avoir des avis extérieurs sur ce qui fonctionne ou non, mais j’ai envie que quelqu’un simplement le lise pour ce qu’il est, une histoire, qu’il aille au bout de l’aventure que j’ai posé sur papier.
À très bientôt,
Marion.
Sache que je serais ravi que tu me choisisses pour lire ton roman ! J’ai hâte de lire ce que tu nous réserves. Écrire un livre, c’est un travail d’orfèvre, quelque chose de monumental… En tant que rédacteur en chef au service de nombreuses rédactions depuis mes 10 ans de carrière, je sais ce que c’est que de lire, de modifier, de corriger, de cocher… Ça donne mal à la tête.
Tu as raison, l’écriture a quelque chose de catalyseur, de libérateur, du moins pour les personnes qui se sentent à l’aide dans cet exercice. Et en effet, la rigueur est cruciale pour réussir à concrétiser un tel projet. C’est bien que tes proches comprennent ta démarche à présent, ce n’est jamais évident, surtout quand tu réalises une partie de tes projets chez toi, dans le lieu de vie des personnes qui t’entourent. Ça demande du cran, mais aussi une certaine forme de sérénité qui se renforcera avec le temps. Gros bisou Marion et donne-toi à fond !
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Waouh merci Éric !!! Ce commentaire me donne la pêche. Et quand il est terminé je te l’envoie 😉
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Et bien, bon courage…
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Merci 😉, ces 4 mots sont bien étranges 😅
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Ah bon, mais pourquoi ? 🙂 Tu vas vraiment en avoir besoin…
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Tu parles de l’envoie aux éditeurs?
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Oui… Et de l’avant et de l’après…
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Les gens qui réussissent à écrire me fascinent moi qui débute des centaines de projets littéraires et qui ne les finis jamais ! Courage à toi et je te souhaite une très belle année =)
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Laisse toi aller, arrête de te prendre la tête et donne nous quelque chose à lire 🙂
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Ahahaha merci pour ce commentaire qui secoue les tifs!
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Je suis totalement admirative, écrire est quelque chose de compliqué et je te tire mon chapeau ! Personnellement, j’adore lire, j’adore écrire des analyses littéraires et cinématographiques, mais voilà, je ne suis absolument pas douée pour une écriture plus imaginative, je laisse la place à ceux qui savent le faire 😉
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Je vois les deux comme la même chose. Une analyse littéraire il faut des idées, une manière d’écrire propre à chacun, une inspiration. Je suis sûr que si un jour tu as une idée qui germe dans ta tête tu seras tout à fait disposer à en faire une nouvelle ou un roman. Une fois que tu es habituée à écrire quelque soit le genre où le format tu es rapidement à l’aise. Après c’est mon opinion 😉
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Beaucoup me poussent à le faire, mais je ne m’en sens pas capable…Comme tu le dis, ça viendra peut-être un jour ! En attendant, je compte bien te suivre dans cette nouvelle aventure 😉
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C’est un long processus, en fait.
J’ai écrit mon premier roman très jeune ( à 16 ans ) et c’était passablement mauvais ( je l’ai toujours). Puis, je n’ai écrit que des poèmes, des nouvelles, des bouts de … trucs et dès que les blogs sont apparus, j’ai blogué 😉 J’ai longtemps hésité et c’est grâce à la fan fiction que la confiance est revenue, assez lentement.
Il y a 1 an, j’ai enfin mis le mot fin sur un long roman que j’ai mis 4 ans à écrire (parce que les journées ne sont pas si longues, en effet). Puis, j’ai enchaîné…
Maintenant, j’envoie doucement aux éditeurs et c’est la phase la plus difficile. Mais je crois que je ne suis plus si pressée 😉
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Avoir terminé le roman c’est déjà un accomplissement !
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C’est passionnant de te lire dans cet article, de voir la façon dont tu parles de l’écriture, du chemin qu’il t’a aussi fallu pour y mener. Effectivement, je pense qu’il faut dépasser à un moment une prise de conscience (soit en l’écrivant une fois pour toutes, soit en l’ayant en tête après avoir écrit diverses choses) que l’écriture reflète toujours nos obsessions, nos moments de vie, nos idées noires, nos extrêmes. Qu’il faut vraiment l’accepter, et finir par en jouer et s’en servir, sans avoir peur de soi. Et là on écrit différemment, avec plus de maturité. et ça nous aide. Stephen King donne de bons conseils, après, je n’en ai pas cherché tant d’autres, mais je trouve génial ta manière de procéder, d’avoir fait des plans, des listes, de t’être demandée ce que tu aimais, ce que tu aurais voulu écrire, pour qu’au final cela ressorte en quelque chose qui n’y ressemble pas, mais dont tu hérites par tes influences en quelque sorte. C’est passionnant de voir comment les esprits de chacun fonctionnent quand ils écrivent. (pour un peu tu me donnerais envie de faire quelques articles sur l’écriture, même si chacun en a une expérience très intime et différente !)
Et cet article-bilan doit être un vrai soulagement pour toi, faire le point, voir le chemin parcouru pour arriver à quelque chose de fini. Le travail c’est de l’inspiration et des vrais moments de transport, mais c’est aussi des efforts, et s’y mettre même on n’a pas envie, c’est corriger, réécrire, changer, toujours s’y mettre. D’où l’importance d’un lieu à soi que je comprends parfaitement.
Pour la suite, je ne peux que t’encourager, te souhaiter du courage et de la ténacité pour le finir, pour ensuite relire, corriger, mais aller au bout. Quand ce sera fini, ce sera un drôle de sentiment, mais tu seras fière aussi. Alors, excellente inspiration, ne te bride pas, laisse-toi transporter par tes idées, fais-toi plaisir aussi. Et bravo pour tout ce boulot déjà accompli !
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Cet article est un soulagement mais je me rends compte qu’il me met la pression, c’est comme si j’avais un pointeur au dessus de la tête 😅
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Ne te mets pas la pression ! Profite de ton écriture simplement!
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Je ne savais pas que tu travaillais sur un roman ! Ton article est passionnant et je me retrouve assez dans ta démarche : faire des listes, des plans, etc. Bon courage pour la suite du travail !
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