Mon blog, je le vis un peu à ma façon. Les partenariats me déplaisent profondément (sauf ceux avec les blogopotes), car ils nécessitent une implication quotidienne. Ce que j’aime dans ce blog, c’est la liberté. Si je n’ai pas écrit d’articles pendant 6 mois, je ne vais pas me flageller, et si j’ai envie tout d’un coup d’écrire sept articles en une semaine sur un sujet hors du Cinéma, et bien je ne vais pas créer de barrières inutiles. Lectrice compulsive autant que spectatrice boulimique de films, j’ai de plus en plus envie de partager ma passion pour la bulle et les cases. Quoi que nous verrons qu’une BD peut être sublime sans le moindre mots, intemporelle par sa seule image.

Me voici donc lancée dans ce nouveau challenge d’une semaine: Un jour, 5 BD, tous les jours à midi. Vous trouverez des œuvres cultes qu’on ne présente plus (mais moi je ne vais pas me gêner), des pépites et autres curiosités que j’ai adoré. Je vous proposerais d’abord un synopsis officiel des œuvres, puis je vous donnerai mon avis sur la lecture. Il y aura du sang, du gore, des larmes, du rire, bref, que des œuvres qui transpercent et permettent de faire voyager le cœur et l’esprit. À la fin de la semaine, si vous avez assez de patience pour tout lire, vous aurez même le droit à une photo détaillée de ma bibliothèque 😉

Serena


Anne-Caroline Pandolfo (scénariste) et Terkel Risbjerg (dessinateur). Edition Sarbacane / 2018

Belle Serena vient d’épouser George Pemberton, riche exploitant forestier. Leur projet ? Exploiter jusqu’au dernier arpent le bois des Smoky Mountains. Ce sont les années 30, la crise a jeté sur les routes des hordes d’ouvriers et leurs familles. L’aubaine est trop bonne pour ces deux monstres, qui se vivent comme seuls au monde. Ils vont imposer leur loi, impitoyable, à des bûcherons traités comme des esclaves.
Cheveux courts, allure altière, la minérale Serena parcourt sans relâche ses terres à cheval, un aigle perché sur le bras. Elle inspire aux bûcherons médusés autant la peur que la fascination. Et dans son sillage, le récit prend des allures de thriller sauvage et impitoyable…
Serena consumera-t-elle les arbres et les hommes jusqu’au dernier ?

Serena Pemberton, c’est l’anti-héroïne que j’attendais, un véritable personnage sans coeur et prêt à tout pour arriver à ses fins, sans artifice. Telle une prodige aux échecs, elle parvient à déjouer tous les coups, à tout appréhender à l’avance, vivant sa vie selon ses propres règles. Tous ne peuvent vivre que par elle et dans son ombre, car Serena est une femme puissante grâce à un caractère courageux, intraitable, fier et froid. Devinant un passé atroce, architecte de ce personnage sans jamais le dévoiler, le lecteur l’observe affronter la vie sans sourciller, contre vents et marrées, avec toute la cruauté du monde. Une perle scénarisée par la très talentueuse Anne-Caroline Pandolfo, d’après un roman de l’auteur américain Ron Rash.

Les Bons Gros Batards de la Littérature

Aurélien Fernandez (auteur, dessinateur), Guillaume Plassans (auteur). Les éditions Lapin / 2020

Victor Hugo, Georges Sand, Flaubert, Voltaire, Colette, Baudelaire… L’Histoire de la littérature compte de de nombreux grands hommes, et de nombreuses grandes femmes, dont les noms résonnent aujourd’hui encore dans les salles de classe, dans les rues et dans les mémoires. Des héros, des génies, des artistes incroyables, mais aussi, parfois… des bons gros bâtards !

Je pense que dans une autre vie, Tommy a été un bon gros bâtard de la littérature…

Je lis depuis toute petite, j’ai eu ma période de « classiques », j’ai fait L, j’ai une PAL immense, … Mais je pense que n’importe qui, même un profane de la littérature, pleurerait de rire face à ces anecdotes et petites histoires de bons gros bâtards! Pour moi ce livre c’est une lettre d’amour pour ces auteurs légendaires, mais aussi une façon de les faire un peu quitter leur piédestal et les rendre plus humains. À lire d’urgence, que vous soyez triste, heureux, amoureux, seul, ronchon, …

Neonomicon

Alan Moore (scénariste) et Jacen Burrows (dessinateur). Edition Urban Comics / 2013

Des agents du FBI visitent l’un de leur ancien collègue interné dans un asile psychiatrique. Deux crimes lui ont été imputés. Depuis, ce dernier, Sax, ne parle plus, mais cela n’empeche pas Lamper et Brears d’enquêter sur cette sombre histoire. De l’univers des dealers de leur ville, aux cercles fermés d’initiés à des rituels sexuels pour le moins étranges, les deux agents sont bien loin d’imaginer ce qui s’est réellement passé…

Lecteur sensible, passe ton chemin. Je suis habituée au trash avec Alan Moore, mais je ne m’attendais pas à ce niveau de sordide. Dans la lignée de ses autres scénarios s’aventurant du côté de l’univers de Lovecraft (je vous conseille également la lecture de Providence, même scénariste, même dessinateur), Moore se frotte à l’esprit tordu de l’Homme, cheval de bataille de ce maître scénariste misanthrope, qui se passionne pour la folie, les créatures cauchemardesques et autres sectes millénaires… Un comics loin d’être considéré comme un chef d’oeuvre, mais pour une fan du Cthulhu et de Moore, tout était présent pour me contenter.

Magasin Général

Régis Loisel (auteur, dessinateur) et Jean-Louis Tripp (auteur, dessinateur). Edition Casterman / 2006 / 9 tomes

Marie, jeune veuve, s’occupe du Magasin Général dont elle hérite à la mort de son époux. Elle doit se montrer forte pour arriver à tenir l’établissement tout en étant accablée par son chagrin. Au bout de quelque temps, elle découvre un mystérieux inconnu sur le bord de la route, Serge. Son motocycle étant paralysé par les premières chutes de neige, Marie décide de l’héberger dans une remise attenante à l’échoppe.

Classique que j’aime tendrement, Magasin Général est l’alliance surprenante de deux génies de la BD qui ont dessiné ET écrit ensemble cette fable humaine sur une petite communauté attachante du début du XXè siècle. Bijou visuel par un trait et des couleurs généreuses, on passe facilement du rire aux larmes grâce à une écriture documentée, nous offrant un voyage en patois dans un Quebec aux paysages qui laissent rêveur. Un succès disponible dans une sublime édition intégrale en trois volumes que je dorlote dans ma bibliothèque avec amour.

Mon Père, cet enfer

Travis Dandro (scénariste, dessinateur). Edition Gallimard / 2020

Travis Dandro apprend à l’âge de six ans que l’homme avec qui il joue tous les week-ends n’est autre que son père biologique. «Papa Dave» a tout d’un dur à cuire et est aussi accroc à l’héroïne. Alors que l’addiction de son père devient ingérable et que sa mère s’avère totalement dépassée, le jeune Travis, traumatisé par l’attitude toxique de son entourage, essaie tant bien que mal de vivre avec l’innocence d’un garçon de son âge.
Une enfance marquée au fer rouge.

Claque émotionnelle, Travis nous plonge avec lui dans son propre enfer. J’en suis sortie chamboulée, vivant à ses côté durant toute la lecture l’horreur quotidienne d’un gamin sans enfance, dans un univers monochrome pour mieux ressentir la peur d’un démon que trop bien réel. La construction du récit est brillante, présentant les souvenirs de la petite enfance comme des flash courts et frappants, la mémoire se voulant plus précise à mesure qu’on entre dans l’adolescence d’un jeune homme plein de haine, à l’instinct protecteur décuplé. L’auteur nous offre sans concession son intimité, sans fard, pour coller au plus près de sa vérité, de son histoire. Un récit nécessaire.