Il y a peu de réalisateurs qui mettent tout le monde d’accord. John Carpenter est de cette trempe là. Si vous êtes un lecteur assidu de mon blog, vous savez d’ailleurs qu’il est le réalisateur de mon film préféré. Et ça n’a donc pas été de la tarte de ne parler que de trois films de ce bougre, parce que sa filmo, je la connais par cœur, que j’aime presque tous ses films, et qu’il y a bien plus de trois films cultes dans cette collection. Alors non je ne parlerai pas de Halloween, ni du Prince des Ténèbres ou de Assaut. J’ai partialement décidé aujourd’hui de parler de ces trois films à la qualité fort disparate:

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New York 1997, 1981
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The Thing, 1982
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Ghost of Mars, 2001

Oui Ghost of Mars est dedans ne criez pas. Je l’aime d’amour bien que je reconnais la liste immense de défauts qui le définie. Je voulais un film plus récent du réalisateur, sans pour autant avoir envie de parler de The Ward. Les deux autres sont des trésors du cinéma intouchables.

Comme tout grand artiste, le monsieur à des obsessions qui traversent les décennies. C’est les idées fixes de grands réalisateurs que j’avais envie de mettre en avant dans cette rubrique nouvellement créer. D’ailleurs, à propos d’artiste, il dit quoi de lui-même Johnny?

En France, je suis un auteur, en Allemagne, je suis un cinéaste. En Grande-Bretagne, je suis un réalisateur de film d’horreur. Aux États-Unis, je suis un raté.

Prouvons donc à ses détracteurs ricains que Carpenter a de la suite dans les idées (fixes) et que l’homme est un fucking grand cinéaste.

Un film, un lieu

De la contrebasse et trois notes de Ennio Morricone, une nature blanche et vierge de tout en plein antarctique, un chien qui court et un hélicoptère qui le poursuit. C’est ainsi qu’on commence une légende. The Thing, je l’ai découvert au tout début de l’adolescence, et c’était un bouleversement. Il a assis ma passion pour le cinéma, et celle de beaucoup d’autres je pense. Plus que les acteurs, c’est le lieu qui est le personnage au centre de l’histoire; une station scientifique au milieu de nul part dans cet enfer blanc. Et les enfers de Carpenter sont tous définis dans ces films, au point d’être dans le titre, à l’image de New York 1997 et sa prison de Manhattan ou de Ghost of Mars et sa cité minière de Shining Canyon. John Carpenter réinvente dans ses films le huis clos. Les murs sont l’immensité glacée, un désert aride ou les ponts minés d’une île.

 

Et ces lieux, même s’ils sont habités, sont toujours liés à l’inconnu. Ainsi dans Ghost of Mars, la planète rouge est une terre nouvelle qui abrite l’inconnu et est source d’énigmes, à l’image de ce tunnel construit par l’Homme bien avant l’arrivée de ces nouveaux colons et ces martiens fantômes enfermés par un sceau. L’étendue glacée de The Thing est une terre vierge abritant sous la glace un vaisseau spatial et son alien. D’où vient-il, pourquoi s’est il crashé, que s’est-il passé dans la base norvégienne (réponse que donne malheureusement le The Thing de 2011, perpétuant l’habitude exécrable de ne laisser aucun mystère). New York 1997 a cette originalité d’être une ville connue tout en étant un questionnement sur ce qui attend Snake dans ce quartier prison déserté de toute autorité officielle.

Johnny hypocondriaque?

À la fin des années 70 et au début des années 80, le monde découvre avec terreur le SIDA. Et cette peur de contamination par le sang, on la retrouve dans The Thing, et se veut même la base du film. La peur des aiguilles est d’ailleurs bien présente dans New York 1997 quand Snake refuse l’injection au bloc avant l’arrivée à Manhattan, avant de l’accepter quand le médecin lui dit que c’est pour le protéger de toute contamination dans la ville. Dans Ghost of Mars, cette contamination est transportée par l’air, avec des fantômes se déplaçant avec le vent pour pénétrer l’orifice le plus approprié. Cet aspect organique, on le ressent partout, au travers des thématiques donc mais aussi des couleurs, avec des nuances franches et contradictoires. D’ailleurs, quel que soit les films du réalisateur, on retrouve une nette dominance de vert, bleu et rouge. Le vert et le rouge marquent quand ils sont ensemble l’opposition et souligne l’aspect organique du récit.

 

Échec et mat

Au delà d’un aspect visuel travaillé et entêtant, c’est la virilité et la puissance qui sont omniprésentes dans ces trois œuvres, même (et surtout) au travers des personnages féminins. C’est d’ailleurs la femme qui est au début de l’action de chacun des films, allant même jusqu’à déclencher le récit. The Thing, qui ne compte que des personnages masculins, a tout de même un cinglant message porté par la voix de Adrienne Barbeau, qui « double » l’ordinateur au tout début du film quand McReady perd une partie d’échec contre le PC qui répète alors inlassablement « échec et mat ». Au début de New York 1997, c’est une femme qui a détourné l’avion et hurle que la société américaine capitaliste sombrera. Dans Ghost of Mars, la commandante et son adjoint sont des femmes dont la poigne de fer n’a d’égale que leur combativité et leur adresse dans l’action. Cette virilité toute puissance est incarnée et symbolisée par Kurt Russell, acteur fétiche et grand ami de Carpenter au cours de leurs cinq collaborations. Car Snake Plissken, anti-héro de New York 1997, c’est une aura de transpiration virile, le regard profond et agressif et une inspiration infinie pour ceux qui viendront après, à l’image du jeu vidéo Metal Gear et son personnage Solid Snake.

John Carpenter est un artiste complet qui a travaillé de nombreux aspects de ses films, notamment avec des bandes originales cultes (Halloween) qu’il a composé, des scénarios mythiques et des montages iconiques. Parce que le monsieur touche à tout est un perfectionniste et est le maître de toute une génération de fou de Cinéma qui ne seraient rien sans lui. Il a en tout cas fait un nombre immense de films que je vénère et chéris. Alors je lui dis merci!

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John Carpenter et Kurt Russell en 2013

John Carpenter c’est aussi:

  • Assaut, 1976
  • Halloween, 1978
  • Fog, 1980
  • Christine, 1983
  • Prince des Ténèbres, 1987
  • Invasion Los Angeles, 1988
  • L’Antre de la folie, 1995
  • Vampires, 1998

… Et beaucoup d’autres